Décret N°2024-742 du 6 juillet 2024 : Cure de simplification ou alourdissement normatif ?

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Par Yann Borrel – Associé responsable du pôle d’expertise Affaires Publiques – LEXION AVOCATS

Un décret portant simplification en matière d’environnement a été publié au Journal officiel le 7 juillet 2024. Ce décret, qui a été pris pour l’application des articles 4, 5, 8, 9 et 14 de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte, retiendra l’attention des praticiens tant en raison de son objectif, qu’en raison de l’étendue des domaines sur lesquels il porte.

D’une part, l’objectif poursuivi par ce décret est de simplifier les procédures administratives applicables aux entreprises dans le domaine de l’environnement, comme l’avait prévu la loi du 23 octobre 2023.
D’autre part, les procédures concernées par le décret sont très variées (la liste ci-dessous n’est pas exhaustive) :

– procédure de débat public lorsque la CNDP est saisie par une personne publique (art. 1er) ;

– procédure applicable lorsqu’un projet est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement d’un autre Etat membre de l’Union européenne ou partie à la convention du 25 février 1991 sur l’évaluation de l’impact sur l’environnement dans un contexte transfrontière (art. 4) ;

– procédure d’enquête publique (art. 7 à 13) comprenant une refonte et une densification des dispositions portant sur l’indemnisation du commissaire-enquêteur ;

– procédure de l’autorisation environnementale (art. 14 à 31) ;

– procédure de création des secteurs d’information sur les sols (art. 33 à 36) ;

– procédures de cessation d’activités des installations soumises à autorisation, à enregistrement et à déclaration (art. 37 à 44 et art. 46) ;

– procédure de caducité et de prorogation de l’arrêté d’autorisation, de l’arrêté d’enregistrement ou de la déclaration avec un refonte de l’article R. 512-74 du code de l’environnement (art. 45) ;

– procédure dite de « tiers demandeur » (art. 47 à 52).

Les apports du décret sont très différenciés selon les procédures concernées. Sous couvert de simplification, les rédacteurs du décret ont parfois été contraints de procéder à la réécriture d’une partie d’un régime (à l’instar de la procédure de réhabilitation des terrains d’assiette des installations soumises à autorisation codifiée à l’article R. 512-39-3 du code de l’environnement) quand ce n’est pas à la réécriture d’un régime en entier (à l’instar de la procédure dite de « tiers demandeur »), qui en est déjà à sa quatrième version depuis sa création…

Il faut néanmoins reconnaître que plusieurs dispositions du décret viennent simplifier certains régimes tout en les sécurisant. En particulier, on retiendra que dans le cadre de la réhabilitation des terrains des installations relevant du régime de la déclaration, le silence gardé par le préfet pendant deux mois à compter de la réception de l’information relative à l’achèvement de la réhabilitation vaudra désormais acceptation des conditions de la cessation d’activité, qui sera alors réputée achevée au terme de ce délai (cf. nouvel art. R. 512-66-1 du code de l’environnement issu de l’article 43 du décret).

Pour autant, cet achèvement ne fera pas obstacle à l’application des dispositions de l’article R. 512-66-2 du même code qui prévoient qu’à tout moment, même après la remise en état du site, le préfet peut imposer à l’exploitant, par arrêté pris dans les formes prévues à l’article L. 512-12 du code de l’environnement, les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 du même code.

Par ailleurs, on relèvera que le décret est venu abroger :

– L’obligation de constitution des garanties financières pour les installations qui relevaient jusqu’alors du 5° de l’article R. 516-1 du code de l’environnement : les dispositions des arrêtés préfectoraux qui avaient prescrit antérieurement au 25 octobre 2023 la constitution de garanties financières pour ces installations, dans sa rédaction en vigueur à la veille de l’entrée en vigueur du décret du 6 juillet 2024, sont abrogées (cf. art. 64 du décret) ;

– Le décret n° 2012-633 du 3 mai 2012 relatif à l’obligation de constituer des garanties financières en vue de la mise en sécurité de certaines installations classées pour la protection de l’environnement (cf. art. 65 du décret) ;

– Le décret n° 2015-1250 du 7 octobre 2015 relatif aux garanties financières pour les installations classées pour la protection de l’environnement (cf. art. 65 du décret) ;

– L’arrêté ministériel du 31 mai 2012 fixant la liste des installations classées soumises à l’obligation de constitution de garanties financières en application du 5° de l’article R. 516-1 du code de l’environnement (cf. art. 65 du décret) ;

– L’arrêté ministériel du 31 mai 2012 relatif aux modalités de détermination et d’actualisation du montant des garanties financières pour la mise en sécurité des installations classées et des garanties additionnelles en cas de mise en œuvre de mesures de gestion de la pollution des sols et des eaux souterraines.

Enfin, il est à noter que le décret est entré en vigueur le lendemain de sa publication, sous réserve d’un report de l’entrée en vigueur de plusieurs dispositions s’agissant, tout particulièrement, de celles relatives à la procédure de l’autorisation environnementale et qui entreront en vigueur le 22 octobre 2024 (cf. art. 70 du décret).

Par Yann Borrel – Associé responsable du pôle d’expertise Affaires Publiques – LEXION AVOCATS